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Un an, c’est long. Surtout au lendemain de La Route du Rock, quand on se dit que c’est le temps qu’il nous faudra patienter avant d’y goûter à nouveau. Et malgré la gueule de bois qui nous frappe après ces trois jours de concerts, c’est toujours ce même sentiment qui domine : celui d’avoir pris part à un moment unique, génial et hors du temps.

Alors forcément, avec l’une des plus belles programmations de ces dernières années, la 28ème édition de La Route du Rock ne pouvait pas échapper à la règle. Avec entre autres Patti Smith, Grizzly Bear, The Black Angels et Nils Frahm pour nous en assurer, le festival malouin n’a pas déçu, loin de là !

Allez, on vous raconte.

Soir 1 – Vendredi 17 Août @ La Route du Rock

Cette année, on a décidé de mettre le cap tôt sur St-Père-Marc-En-Poulet afin d’éviter l’heure de pointe et les files d’attente prises d’assaut par ceux qui sortent du boulot. On récupère notre bracelet, on file au camping, on installe la tente et la tonnelle, et on attend les copains pour notre rendez-vous annuel qu’est La Route du Rock. Bien évidemment, toutes ces retrouvailles nous font rater les premiers concerts et notamment Villejuif Underground dont nous avions pourtant placé beaucoup d’attente lors de notre article pré-festival.

On débarque donc pour Grizzly Bear dont notre dernier souvenir remonte à 2013 au Latitude Festival en Angleterre. Et quel plaisir de retrouver Edward Droste et sa bande ! Sans parler des problèmes de sons, la pop incomparable du groupe nous transporte une nouvelle fois, avec pour fil conducteur leur excellent et meilleur album selon nous : Veckatimest (Warp Records, 2009). L’apothéose viendra avec le tube Two Weeks, reprit en cœur par le public.

On enchaîne par les Anglais de Shame qui, avec leur premier album Songs of Praise (Dead Oceans, 2018) ont remplit le contrat de faire bouger les rockeurs du Fort. À l’image de groupes comme Idles l’an dernier ou Metz en 2014, on a eu la dose punk que l’on attendait ! Patience maintenant jusqu’à leur deuxième album qui devrait confirmer tout l’espoir que l’on place en eux.

Coup de cœur aussi pour The Black Angels, dont nous n’avions aucun doute quant à leur talent et leur prestance scénique. Un visuel magnifique combiné à des guitares saturées pour un résultat percutant et psychédélique. On en attendait pas moins !

Puis, le moment tant attendu arrive avec l’entrée en scène du grand Etienne Daho ! Aussi ému que son public, celui qui a contribué à l’émergence d’une véritable scène rennaise dans les années 80, enchaîne ses classiques qu’il ponctue des morceaux de son nouvel album Blitz (Capitol, 2017). Un album aux arrangements plus électriques, qui fonctionne auprès des fans de la première heure mais pas autant pour ceux qui, comme nous, ont accroché sur le tard à sa pop lunaire.

Accompagnés par d’excellents musiciens, on est ébloui par la puissance communicative de ses tubes intergénérationnels tels que Le grand sommeil et Le premier jour. Petite frustration tout de même avec une version de Weekend à Rome exclusivement a cappella et sur laquelle on aurait tant aimé danser et conclure cet instant en beauté.

Soir 2 – Samedi 18 Août @ La Route du Rock

Le samedi, à peine revenu de la plage et des irremplaçables moules-frites du midi, place à la légende Patti Smith dont la venue est le fruit d’années de tractation de la part des organisateurs de La Route du Rock.

Si l’annonce de sa programmation a fait remonter la moyenne d’âge du public de la soirée, son message et ses morceaux n’ont rien perdu de leur jeunesse. Because the Night, tube intemporel co-écrit il y a tout juste 40 ans avec Bruce Springsteen, ravira les plus romantiques. Mais c’est surtout la figure héroïque de la rockeuse septuagénaire qui marquera les esprits ce soir, au bout d’une prestation majestueuse, engagée et émouvante.

Des fans de la première heure venus spécialement pour la légende américaine, il n’en reste finalement peu devant le concert d’Ariel Pink qui débute sur la scène des Remparts. Pourtant, avec la sortie de Dedicated To Bobby Jamesson (Mexican Summer, 2017), le fantasque Californien signe l’un de ses meilleurs albums et confirme toute l’étendue de ses talents de songwriter. L’album souffle ainsi une pop psychédélique lumineuse et irrésistible que l’on retrouve aussi bien sur l’énervé Time to Meet Your God que sur le fabuleux Another Weekend.

Sur scène, Ariel Pink restitue son répertoire loufoque avec une intensité insoupçonnée, et apporte à ses compositions célestes de nouveaux reliefs. On se surprend alors à danser frénétiquement sur chacun des morceaux, et même à pogoter sur Bubblegum Dreams dans un joli bordel comme on en redemande, pour l’un des meilleurs moments de cette édition.

Nils Frahm, que nous avions vu à Cambridge en février dernier, nous livre ensuite un set progressif et puissant, entre nappes synthétiques et compositions aériennes, confirmant tout le bien que l’on pense de lui.

Un avant-goût d’une fin de soirée résolument électronique, avec déjà l’Allemande Ellen Allien qui démarre au quart de tour son set techno minimal sur la scène du Fort. Veronicka Vassicka, autre attraction électro de la soirée conclura par une sélection aux accents coldwave, plus variée.

Parfait avant de reprendre la route du camping pour une fin de soirée placée sous le signe de la boom box, dont nous tairons – question de réputation – la sélection musicale de vos aimables serviteurs ce soir-là.

Soir 3 – Dimanche 19 Août @ La Route du Rock

À l’aube du troisième jour, les excès de la veille nous appellent à aller à l’essentiel : direction Saint-Malo intra-muros et la bien-nommée plage de Bon-Secours pour assister au concert de Forever Pavot. Car quand il s’agit de soigner son mal de crâne, la pop barrée de Émile Sornin dispose des mêmes effets thérapeutiques que l’eau de mer bretonne. Le Parisien délivre ainsi ses morceaux chatouillants avec la même énergie nonchalante qu’en studio, entraînant avec lui tout le public de la plage dans son imaginaire psychédélique. Contrat rempli donc, et une barre d’énergie gonflée à bloc pour aborder idéalement la dernière soirée du festival, laquelle débutera pour nous avec le concert de Phoenix.

Si la venue des Versaillais nous évoque surtout un goût de déjà-vu (Vieilles Charrues 2013 et 2017, Beauregard 2017…), leur programmation ce soir, 15 ans après leur dernière Route du Rock, est un petit événement à l’échelle du festival. Et le groupe le lui rend bien : un show impeccable, ponctué de leurs plus grands tubes tels que If I Ever Feel Better ou Lisztomania, mais également du plus discret mais néanmoins incontournable Love Like a Sunset.

Sur la scène d’en face, les Lemon Twigs enchaînent sans toutefois parvenir à nous séduire. Leur glam-rock inspiré des Beatles et des Beach Boys ne nous fait ni chaud ni froid, et ce n’est pas leur jeu de scène relativement statique qui nous fera rester plus de quelques titres. À tort sans doute, tant le retour des festivaliers a été unanime en leur faveur. Mais l’ambiance pour nous était davantage à la fête.

Ce que nous cherchons, nous le trouverons auprès des Londoniens de Jungle : une prestation majeure, hyper-dynamique et terriblement dansante, habilement menée entre tubes incontournables du premier album et ballades groovy à paraître sur le prochain opus. Le groupe semble ainsi avoir trouvé l’équilibre musical qui lui faisait défaut en développant davantage de nuances et de variations à ses morceaux, à l’image du récent single Happy Man. À confirmer dès le 14 septembre, date de sortie annoncée pour For Ever (XL Recordings, 2018).

Le concert est à peine fini que déjà les premières notes de R.A.S. 100% Soukouss retentissent. C’est le top départ de “la plus grande chenille du monde”, qui comme annoncée sur la programmation du festival doit faire la transition avec The Black Madonna. Mais entre nous, c’est surtout le moment opportun pour s’extirper de la foule et remplir son verre sans faire la queue (leu-leu).

Une fois l’hystérie générale retombée, la DJ de Chicago peut lancer son set. Pourtant réputée pour sa sélection house, The Black Madonna dégaine une techno radicale, qualitative certes, mais néanmoins décevante par rapport à l’ambiance générale de cette fin de week-end. La détente ne surviendra qu’après une bonne heure de set avec des morceaux de plus en plus solaires et groovy.

C’est sur ces derniers pas de danse que s’achève cette 28ème édition de La Route du Rock – Collection Eté. Une édition haute en couleur, avec son lot de concerts inoubliables et toujours, une ambiance incomparable qui confirme que le festival malouin n’a rien à voir avec les autres. Direction le camping à présent, avant un douloureux retour à la réalité… Et de lancer dès demain, notre éternel compte à rebours : J-365 avant la prochaine fois.

LaGumz, Corentin G. & Jah