Interview – Zombie Zombie

Comme on vous l’avait annoncé lors de notre report du concert de Sextile et Zombie Zombie à l’Antipode MJC, on a réussi à chopper Zombie Zombie pour une interview juste avant leur passage sur scène. En tournée avec leur dernier album Livity, on a avant tout parlé musique mais aussi prestation scénique et cinéma français.

Rencontre avec :

  • Etienne Jaumet : boite à rythmes, saxo, synthé.
  • Cosmic Néman : batteries, effet voix, cri, magnéto grande cassette
  • Docteur Schönberg : percussion, bongo, électronique, trompette, synthé buchla, magnéto mini-cassette.

On sait que vous n’aimez-pas trop cette question mais on va quand même l’oser, on voit plein de termes différents pour qualifier votre musique : krautrock, techno… Sans vouloir vous caser dans un style spécifique, comment est-ce que vous positionnez par rapport à cela ? Plus largement comment est-ce que vous parlez de votre propre musique ?

Cosmic Néman : En effet, on préfère jouer que mettre notre musique dans une case. C’est plutôt les journalistes qui font ça. Nous ça ne nous dérange pas. On ne revendique pas une scène, on est à la croisée des chemins et c’est ce qu’on aime dans notre musique.

Etienne Jaumet : Les journalistes trouvent toujours des termes différents. Je ne suis pas sûr qu’on soit dans une école française, mais pour moi il y a quelque chose de français dans la façon dont on fait de la musique. L’utilisation des instruments électroniques qui est quelque chose de très français. Dans l’improvisation aussi, le mélange de rock et de jazz, à l’image de ce que certains groupes pouvait faire dans les années 70. Enfin une approche club qui correspond à une touche française.

Vos compositions semblent taillées pour le live, est-ce que vous pouvez nous parler de votre processus de création ?

Etienne Jaumet : En fait, c’est plutôt l’inverse, on enregistre live et on joue live, il n’y a pas de différence entre les deux. C’est le même processus, on a les mêmes instruments. La seule chose qui diffère sur scène c’est l’énergie qui est difficile à retranscrire en studio. Sinon tous les morceaux sont improvisés à la base en studio, même si ça peut arriver que quelqu’un arrive avec une idée précise. Mais globalement c’est assez libre à l’enregistrement comme sur scène.

Docteur Schönberg vous a rejoint depuis 5 ans mais Livity est le premier album de Zombie Zombie en tant que trio. Comment avez-vous géré cette transition et comment s’est passé l’intégration d’un troisième membre au projet ?

Etienne Jaumet : C’est venu naturellement car Dr Schönberg était un ami avec qui on avait déjà joué sur plusieurs projets. Ce qui a été compliqué effectivement c’est qu’en duo on avait des automatismes.

Cosmic Néman : Je pense que c’était plus compliqué pour lui de s’intégrer à nous. Il y avait un lien fort entre Etienne et moi et qui fonctionnait déjà très bien en duo. Mais on l’a choisi aussi parce qu’on connaissait sa manière d’appréhender la musique, cette liberté qu’on a aussi. On avait envie de ce truc rythmique, le jeu entre les deux batteries qui fonctionne bien avec la boite à rythme. Le tout est assez excitant, ça apporte quelque chose de vraiment intéressant au projet.

Zombie Zombie @ Antipode MJC - Alternative Lads
Zombie Zombie @ Antipode MJC – Alternative Lads

Pour revenir au live, votre formation (synthés, boites à rythme et batterie acoustique…) est finalement assez singulière par rapport à la scène électronique, notamment par rapport aux DJ-set. Est-ce que ce n’est pas aussi une prise de parti de votre part ?

Etienne Jaumet : C’est à dire que la musique électronique a explosé, beaucoup de gens en écoute beaucoup et vont voir ces artistes. Mais il y a très peu de live, les artistes sont pour la plupart derrière leur ordinateur. Des groupes de musiques électronique avec des synthés comme nous, il y en avait beaucoup dans les années 70-80, mais ce n’est pas nous qui avons inventé la formule.

Cosmic Néman : Pour moi c’est effectivement une prise de position parce qu’on ne se reconnait pas dans la musique jouée par des mecs derrière leur ordinateur. Je ne vois tout simplement pas l’intérêt d’aller voir quelqu’un derrière un laptop, tu perds l’essence de la musique live. Donc oui c’est une prise de position. Je trouve ça important de jouer des instruments, de les montrer. Les gens attendent de voir notre matos. Ce n’est pas sans risque, mais on aime ce challenge d’utiliser ces vieux instruments comme la 808 (NDLR : Roland TR-808).

Votre musique est associée à la scène électronique dont les clubs sont le lieu de diffusion par excellence. Et pourtant vous jouez davantage en salle de concert qu’en club.

Etienne Jaumet : C’est vrai que quand on tourne, on nous associe souvent à des groupes plutôt électroniques. Et c’est sûr qu’on ne joue quasiment jamais dans des clubs avec les DJ.

Cosmic Neman : On le fait de temps en temps dans des clubs, des clubs assez uniques avec un projet plutôt pointu comme le Razzmatazz à Barcelone, où l’on va d’ailleurs jouer en Février pour les 20 ans du club. Au Zukunft aussi, à Zurich. Optimo nous avait invité aussi à Glasgow pour l’une de leur soirée où ils ont l’habitude de débuter toujours avec un groupe en live. Mais globalement il y a très peu d’endroit qui peuvent se permettre de faire ça.

En parallèle de vos albums studios, vous collaborez également sur d’autres projets artistiques. Est- ce que vous pouvez nous parler un peu plus de ces projets ?

Etienne Jaumet : On a effectivement travaillé sur un spectacle de cirque qui s’appelle Slow Future, une super aventure qu’on a mené avec la compagnie Cirque Bang-Bang composée de deux jongleurs. On pourrait trouver ça bizarre mais comme ce sont des fans de musique et qu’ils font du cirque contemporain, plus proche de la danse que du cirque traditionnel, ça a finalement bien fonctionné. On a fait pas mal de représentations et un disque est né de ce projet. Aujourd’hui on a pas mal de proposition avec le cinéma, deux cette année, dont un que l’on vient de terminer avec Sébastien Marnier pour qui on avait déjà fait la B.O. de son film Irréprochable (2015). Cette fois-ci ça va s’appeler L’heure de la sortie, qui devrait sortir l’été prochain. On espère aussi sortir la B.O. mais c’est sûr que ce sont des aventures assez différentes que celle du disque.

Cosmic Neman : Les initiatives ne sont pas venues de nous, ce sont les gens qui sont venus pour nous proposer ces projets. Mais comme ça fait maintenant 10 ans que le groupe existe, on est content aussi de travailler à la maison, au studio et de ne pas être obligé de toujours sortir un disque et de le tourner. Surtout, ça nous fait plaisir que notre musique puisse illustrer quelque chose de visuel. Et puis en France, les compositeurs de musique de film sont toujours les mêmes, c’est un petit milieu et les B.O. se ressemblent à peu près toutes d’un film à l’autre. C’est dommage parce qu’il y a de très bons groupes en France qui seraient capables de faire de bonnes musique de film. Alors quand les gens choisissent des groupes qui ne sont pas forcement dans le cinéma, ce sont de bonnes initiatives.

Etienne Jaumet : Mais on sent que c’est en train de changer avec Yuksek qui avait fait la B.O. de Marguerite et Julien (2015) ou plus récemment Arnaud Rebotini qui est nommé aux Oscars pour la B.O de 120 Battements par Minutes (2017).

Mise à part ces excursions dans le cinéma, quelle va être l’actualité du groupe cette année ?

Etienne Jaumet : On va continuer avec la tournée française jusqu’en Mars, avant d’enchainer sur quelques festivals cet été et la tournée à l’étranger. Je travaille également sur un album solo qui devrait sortir à la rentrée.


Pour conclure, on vous laisse avec la sélection vinyle du trio : fruit de leur visite à Blindspot le disquaire rennais, étape incontournable (ce sont leurs mots) à toutes dates du groupe dans la capitale bretonne.

  • Pandit Pran Nath ‎– Sings Ragas Bheempalasi & Puriyaa Dhanaashree – Palace Theatre / Sri Moonshine Music, 2017 (Musique traditionnelle indienne)
  • Thelonious Monk – ??? (Jazz, 1960s)
  • Dimitris Petsetakis ‎– Endless / Into The Light Records, 2015 (Ambiant)


JU&JAH
(Interview et montage).

Special thanks aux Zombie Zombie d’avoir répondu à nos questions.